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5 janvier 2013

Les Lisières, de Olivier Adam

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Très médiatisé lors de la rentrée littéraire, les avis étaient particulièrement divisés : ce dernier roman était tour à tour le meilleur Olivier Adam ou un énième texte de l’auteur, tourmenté, dépressif à ne pas mettre entre toutes les mains.

J’aime particulièrement l’écriture de cet homme de ma génération, dans laquelle je retrouve un univers mélancolique, ancré dans nos années d’enfance banlieusarde, je n’avais donc qu’une envie, me faire mon propre avis. Mon "chéri-père noël" m’a comblée en le déposant dans mes souliers…

Ce texte m’a, à la fois, réjouie le trouvant particulièrement abouti, et agacée par son coté nombriliste.

Abouti, parce qu’il allie les ingrédients de ses différents livres : le clair obscur de son univers, sa nostalgie, zébrée de fulgurances lumineuses, si bien rendus dans Passer l’hiver, Falaises, Des Vents Contraires, en y ajoutant un zest d’intrigue, de rebondissements qui m’avaient tant plu dans Je vais bien ne t’en fais pas.

Il marie aussi le ton intimiste habituel, avec une vision plus sociétale, présente en arrière plan dans ses autres romans, mais qui là se place délibérément en pièce principale. 

J’ai par contre eu plus de mal avec ses références récurrentes à ses propres textes, à son rapport au monde littéraire parisien, le dénigrant tout en ménageant une complaisance. Ces passages là n’ajoutent rien au propos, rendant le narrateur sans doute un peu plus détestable, sans lui donner plus de corps. Son humanité lui est apportée par l’ensemble du texte, dans toutes ses vulnérabilités et ses imperfections, sans avoir besoin d’y ajouter celles-ci, un brin artificielles.

Il ne reste pas moins que ce roman m’a apporté une vraie joie de lectrice, malaxant la langue avec délectation. Le style épuré des débuts prend plus de chair, sans perdre de son efficacité. Je contredis les avis qui font de ce livre un texte noir, pessimiste.
Bien sûr qu’on n’éclate pas de rire à chaque page, mais l’énergie qu’il recèle me paraît vitale. 

Paul Steiner, 40 ans, auteur a succès, traine son mal de vivre depuis son enfance. Réfugié aux confins du monde, à la pointe Bretonne, il se voit contraint de revenir dans sa maison d’enfance, en banlieue Parisienne, pour seconder son père pendant la convalescence de sa mère.

Ce retour tant redouté aux sources, « aux lisières », arrive à un tournant de sa vie, quand sa femme qui l’a si souvent soutenu, vient de le quitter, lui imposant de ne voir ses enfants qu’un week-end sur deux, alors que la terre japonaise qu’il chérit tant, est soumise aux séismes, tsunamis et autres radiations atomiques.

En proie à la « Maladie » qui le rattrape encore une fois, il s’expose aux souvenirs pourtant si impalpables, au mutisme de son père, ancien communisme séduit par les idées Lepénistes, au mépris de son frère, aux fantômes du passé qui surgissent de ces lisières, de manière inattendue. 

« Je suis resté un long moment à écouter les informations. Les flashs se succédaient et on annonçait des milliers de morts au Japon. On parlait de régions dévastées, de villes rayées de la carte, de maisons, d’immeubles emportés, de torrents de boue charriant des voitures, des poteaux télégraphiques, noyant les champs, les vallées. On parlait de dévastation. D’anéantissement. Un frisson m’a parcouru l’échine. J’ai eu soudain l’impression que le monde voulait me dire quelque chose, là, garé face à la maison de mon père, ouvrier communiste alsacien débarqué à trois ans à Maison Alfort (…) Face à la maison de mon père syndiqué et de ma mère ouvrière à la chaine, s’y usant pendant vingt ans (…). Face à la maison de mon père qui trouvait la fille du Borgne pas mal et de ma mère qui s’était fracturé le col du fémur et commençait à perdre la tête. Le monde qui déclenchait des tsunamis ravageant le pays où nous avions passé les plus beaux jours de nos vies, Sarah, Manon et moi (…). Oui, j’ai eu le sentiment que le monde voulait rayer quelque chose de la surface de ce globe et que ce quelque chose avait à voir avec moi, avec ce qui m’avait fondé, et la part la plus lumineuse de ma vie. »

« J’ai regardé autour de moi et j’ai soudain eu la certitude d’être rentré chez moi, dans ce pays finistère, où nous étions quelques-uns à nous réfugier et à tenter de nous maintenir en vie en nous offrant aux éléments, au ciel aux vagues et au granit, aux mouvements des nuages et des marées, à mener une vie vouée aux falaises et aux miroitements de l’eau, aux étendues sableuses, une vie fondue au paysage, à n’être plus que surface sensible, accueil, perception. »

 

 

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Commentaires
M
Pas aimé du tout , je ne supporte pas sa névrose étalée à toutes les pages...il a un certain style mais pas pour moi..
G
@CAMARA 33 : avec plaisir !
C
Bonjour,<br /> <br /> Je partage votre enthousiasme pour ce nouvel ouvrage d'Olivier ADAM.<br /> <br /> J'ai également ouvert depuis peu un blog de lecture (romans de Carole) et ce livre fait partie de mes favoris.<br /> <br /> Je vais parcourir le vôtre avec attention pour me donner des idées de lecture.<br /> <br /> Bonne soirée.
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